Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ALIX

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ALIX ou ALEYDE DE BOURGOGNE, duchesse de Brabant, morte en 1273, était fille du duc de Bourgogne Hugues, qui mourut l’an 1272, et d’Yolende de Dreux. Elle épousa, vers l’année 1252, et à la suite de négociations conclues sous les auspices du roi d’Angleterre Henri III, le duc de Brabant du même nom, qui la rendit successivement mère de cinq enfants, dont l’aîné mourut en naissant. À la mort de son mari, arrivée le 28 février 1260-1261, Aleyde se vit entourée de dangers et d’embarras. Des parents de son mari, le landgrave de Thuringe et le sire de Herstal, essayèrent de lui enlever la tutelle de ses enfants ; elle parvint à écarter le premier et, par la force des armes, elle expulsa le second du Brabant. Deux autres princes, qui étaient issus par les femmes de la maison ducale, Henri, évêque de Liége, et son frère Othon, comte de Gueldre, conservèrent quelque autorité en Brabant. Peu de temps après, cependant, l’évêque se brouilla avec Berthout, sire de Malines, le principal conseiller de la duchesse, envahit le Brabant et assiégea Malines, mais il dut se retirer sans avoir réussi dans son entreprise.

Henri, l’aîné des fils d’Aleyde, montrant trop peu d’intelligence pour qu’il fût possible de lui confier le gouvernement du pays, la duchesse, de concert avec quelques barons, résolut d’assurer la possession du Brabant au prince Jean, dont la jeunesse donnait les plus belles espérances. Ce projet fut combattu par Arnoul, seigneur de Wesemael, appuyé par les Colveren, l’une des deux factions qui divisaient alors la ville de Louvain. Les Colveren parvinrent à expulser de Louvain leurs ennemis, les Blanckaerts, mais Wesemael fut battu par le seigneur de Malines sur les bords du Leeps, près de Wespelaer. Aleyde, victorieuse, reçut, le 14 mai 1267, la soumission des Louvanistes et convoqua, à Cortenberg, une assemblée des états, où le prince Henri renonça, en faveur de son frère, à tous ses droits sur le duché de Brabant et ses dépendances.

Pendant les années 1261 à 1267, le Brabant avait encore été agité par d’autres événements : des différends avec quelques maisons religieuses, provoqués par des taxes imposées sur les biens du clergé ; une émeute et l’organisation d’une commune à Nivelles ; une ligue d’alliance entre les villes du Brabant en 1261 et 1262 ; des querelles de famille, etc. Aleyde ne fut pas accablée par le fardeau du gouvernement et signala sa régence par plus d’un acte important. En 1262, elle conclut avec la comtesse Marguerite de Constantinople une convention pour l’extradition des malfaiteurs ; en 1266, elle s’assura, contre l’évêque de Liége, l’appui de l’archevêque de Cologne, du comte de Clèves, des seigneurs de Heynsberg et de Fauquemont.

Après l’avénement de Jean Ier au trône ducal, Aleyde continua à exercer une grande influence. Elle intervint encore, à mainte reprise, dans les actes posés par son fils préféré, mais elle mourut dès le 23 octobre 1273. Cette princesse conserva, pour les frères prêcheurs, l’affection que son mari avait montrée pour cet ordre. Elle établit à Auderghem, près de Bruxelles, un couvent de dominicaines, qui prit de sa fondatrice le nom de Val-Duchesse, en flamand ’s Hertoginne Dael, et elle combla de bienfaits le couvent des dominicains de Louvain, où elle fut enterrée à côté de son époux.

Les chroniqueurs de l’époque vantent la prudence et la sagesse d’Aleyde de Bourgogne ; elle sut en effet se maintenir au pouvoir, défendre le Brabant contre une formidable invasion et assurer la transmission de la couronne ducale à celui de ses fils qui était le plus capable de la porter. Les actes du temps prouvent son habileté et son activité dans la diplomatie, de même que son appel aux lumières de saint Thomas d’Aquin, dont elle demanda l’avis sur plusieurs questions d’administration intérieure, fait honneur à sa sagacité.

Alph Wauters.

Butkens, Trophées de Brabant, t. I, pp. 267 et 279. — De Ram, Nouveaux Mémoires de l’Académie royale de Belgique, t. XIX. — Wauters, Le duc Jean Ier et le Brabant sous le règne de ce prince (Mémoires couronnés et autres mémoires publiés par l’Académie, coll. in-8o, t. XIII.)